Bien-aimés, j’ai la joie de partager avec vous aujourd’hui le thème tiré de Néh 2.1 et suivants. En effet, pendant que les fils de Juda étaient dans la misère et dans l’opprobre, Néhémie occupait à la cour un poste des plus honorables: celui d’échanson du roi. Il aurait pu égoïstement conserver cette place avantageuse. Ou encore justifier celle-ci en se disant: Puisque j’ai la confiance du roi, c’est auprès de lui que je serai le plus utile à mon peuple. Dieu m’a placé ici dans ce but.
Mais Néhémie ne raisonne pas ainsi. Son cœur, comme celui de Moïse autrefois, le porte à visiter ses frères, les fils d’Israël (Actes 7:23 ac 7.20-29). Et, plutôt que de jouir pour un temps des délices du palais royal, il choisit «d’être maltraité avec le peuple de Dieu» (Hébreux 11:25 hb 11.23-29).
Remarquez que son entretien avec Artaxerxès est non seulement précédé (ch. 1 v. 11 nh 1.4-11), mais aussi accompagné par la prière (verset 5). Entre la question du roi et sa propre réponse, Néhémie trouve le temps de s’adresser à Dieu dans son cœur. On a appelé cela une «prière-flèche». Imitons plus souvent cet exemple! Et nous verrons, comme ce serviteur – de l’Éternel avant d’être celui du roi – la bonne main de Dieu reposer sur nous et sur ce que nous ferons.
Néhémie est arrivé à Jérusalem muni des lettres du roi. Il commence par faire l’inspection des murailles, ou plutôt de ce qu’il en reste. Son frère lui en avait parlé (ch. 1 v. 2, 3 nh 1.1-3), mais il désire se rendre compte par lui-même de l’étendue des dégâts. Grande est sa consternation devant ce spectacle auquel les habitants de Jérusalem, de leur côté, s’étaient habitués! Chrétiens, nous sommes certainement aussi en danger de ne plus souffrir de l’état de ruine dans lequel se trouve aujourd’hui l’Église responsable. Aucune muraille ne la protège plus contre l’envahissement du monde. Et un tel état fait parfaitement l’affaire de ses ennemis.
Du temps de Zorobabel et d’Esdras, ces ennemis s’appelaient pour Israël: Bishlam, Tabeël… puis Thathnaï, Shethar-Boznaï et leurs collègues. Il s’agit, sous Néhémie, de Sanballat, de Tobija et de Guéshem. Le diable se sert d’instruments divers. Il renouvelle son «personnel». Mais son but est toujours le même: Maintenir le peuple de Dieu dans l’abaissement et dans l’esclavage.
Néhémie sait s’y prendre pour exhorter les hommes de Jérusalem. Son nom signifie: l’Éternel a consolé. Il obtient cette réponse joyeuse et encourageante: «Levons-nous et bâtissons» (verset 18).
Au mois de Nisan (qui était le premier mois, le même que le mois d’Abib où la Pâque était célébrée, et qui fit partie, avec le neuvième mois de Kislev, de la vingtième année d’Artaxerxès), Néhémie donna le vin au roi, en sa qualité d’échanson. Sa prière (1:11) fut exaucée, après qu’il eut «mené deuil plusieurs jours», c’est-à-dire quatre mois environ. Le jeûne et la tristesse avaient laissé leurs traces sur son visage; or il n’était pas permis de se présenter devant le roi avec un visage triste (Dan. 1:10); mais Dieu se servit de ce fait même pour mettre dans la bouche du roi les paroles qui devaient fournir occasion à la requête de Néhémie. De tels miracles, en réponse à nos prières, font partie des circonstances journalières de notre vie chrétienne, si bien qu’à peine y prenons-nous garde. En considérant les choses de près, tout est miracle dans les voies de Dieu envers nous. Il détourne certains dangers, nous procure certaines rencontres, en empêche d’autres, nous fournit des occasions, nous barre certains chemins; en un mot, sa main est partout à l’œuvre pour accomplir ses voies de grâce envers le fidèle ou par son moyen. Il en fut ainsi de Néhémie: «Cela n’est rien que de la tristesse de cœur», lui dit le roi. Néhémie, tout tremblant, ne voyant peut-être pas encore l’exaucement désiré, présente sa requête, mais non pas sans prier de nouveau mentalement le Dieu des cieux pour qu’elle corresponde à Ses pensées. Alors il aborde immédiatement le sujet des ruines de la ville et de ses portes: «Pourquoi mon visage ne serait-il pas triste, quand la ville, le lieu des sépulcres de mes pères, est dévastée, et que ses portes sont consumées par le feu?» (v. 3). Puis il demande à être envoyé en Juda pour bâtir Jérusalem. «Quand reviendras-tu?» lui dit le roi. Néhémie lui «fixa un temps», probablement douze ans (voyez 2:1 et 13:6). «Le Dieu des cieux» est le nom de Dieu, mentionné continuellement dans Esdras et Néhémie, comme Celui qui a donné l’empire aux gentils. Il n’est plus nommé le Dieu de la terre, car, ayant donné comme tel le pays à son peuple, et ce dernier étant déclaré Lo-Ammi, à cause de son infidélité, Dieu avait abandonné ce titre qu’il ne reprendra que plus tard (voyez Esdras; Dan. 2:18, 19, 28, 37, 44).
Remarquons ici une différence importante entre Esdras et Néhémie, mais qui cependant ne jette aucun blâme sur le second de ces hommes de Dieu. Chez le premier, la foi seule est en activité: «Il a honte de demander au roi des forces et de la cavalerie pour l’aider en chemin contre l’ennemi» (Esdras 8:22). Néhémie, au contraire, se fait recommander à la protection des gouverneurs d’au-delà du fleuve et ne s’oppose point à ce que le roi le fasse escorter par les chefs de l’armée et des cavaliers (2:7, 9). Il reconnaît l’appui de la puissance protectrice dont il est serviteur, non pas que la foi lui manque, mais, dans ces temps de misère, elle ne se montre pas avec la même simplicité. Lorsque le temple fût terminé, il ne s’agissait plus pour Esdras que de porter des dons à la maison de l’Éternel. Plus le trésor qui lui était confié était important, plus il fallait montrer au monde que la foi s’en remettait à Dieu pour garder ce qui lui appartenait. Rien de pareil n’avait lieu chez Néhémie; il ne s’agissait ici ni de dons, ni de trésors, ni même de sauvegarder quelques fidèles confiés à sa responsabilité. Néhémie était seul; sa mission ne devait commencer qu’à son arrivée à Jérusalem. Jusque-là il devait reconnaître et accepter sa dépendance du pouvoir gentil. Ce n’était qu’alors qu’il aurait à montrer son amour pour l’œuvre de Dieu et sa persévérance pour la poursuivre à travers toutes les difficultés, dues à l’extrême faiblesse du peuple et à la force de ses ennemis. Dès ce moment-là, nous verrons ces qualités se manifester chez lui, et dans le cours du récit.
Arrivé dans la province de Judée, Néhémie se trouve en contact avec les chefs hostiles au peuple de Dieu, Sanballat et Tobija. Le nom des ennemis avait changé (cf. Esdras 5:6), l’inimitié restait. De même aujourd’hui, le monde reste, sous d’autres noms, le même monde qui crucifia le Christ il y a vingt siècles. Ces ennemis «furent très mécontents de ce qu’un homme fût venu pour chercher le bien des fils d’Israël» (v. 10).
À Jérusalem, terme de son voyage, Néhémie tient d’abord à prendre, de lui-même, connaissance de l’étendue du mal. Il était arrivé en Judée avec les chefs et les cavaliers du roi de Perse, mais, quand il s’agit de l’œuvre, il ne garde que «la bête qu’il montait», c’est-à-dire ses propres ressources et ne dépend en rien de celles que le monde pourrait lui offrir. C’est là que sa foi se manifeste. Jérusalem était sans défense contre l’ennemi, et sa ruine telle, qu’elle n’offrait pas même un chemin où pût passer la monture de Néhémie (v. 13-14). C’était donc bien l’endroit où la foi était appelée à se montrer. Lorsque Dieu nous a confié une œuvre, nous n’avons à prendre conseil que de Lui et nous ne dépendons, comme Néhémie, ni du monde, ni même «des sacrificateurs, ou des nobles, ou des chefs» (v. 16); principe très important pour tous ceux que le Seigneur envoie. Ce n’est qu’après avoir pris connaissance du mal en détail, et seul sous le regard de Dieu, que Néhémie, convaincu de sa mission, peut exhorter le peuple à l’activité pour remédier à la ruine.
Versets compilés pour votre édification et votre meilleure compréhension.
Alors, Néhémie leur présente trois motifs pour les engager à «venir et à bâtir la muraille de Jérusalem». Le premier, la ruine et la misère extrêmes dans lesquelles eux-mêmes et la ville se trouvaient. Le second, la grâce de Dieu qui l’avait encouragé: «La main de mon Dieu a été bonne sur moi». Le troisième, les paroles du roi et son secours, ordonnés eux-mêmes de Dieu, comme il le dit au v.8: «Selon que la bonne main de mon Dieu était sur moi». On voit, par ces paroles, que Néhémie était de la race spirituelle d’Esdras. Il comptait sur Dieu qui répondait pleinement en grâce à sa confiance (voyez Esdras 7:6, 9, 28; 8:22, 31). Néhémie pouvait, comme plus tard le Seigneur, «rendre témoignage de ce qu’il avait vu» (Jean 3:11). Mais au lieu de rencontrer, comme le Sauveur, des gens qui ne reçoivent pas son témoignage, il trouve, pour l’encourager, des cœurs poussés par leur besoin et le sentiment de leur abaissement, et il a la joie d’entendre de leur bouche ces paroles: «Levons-nous et bâtissons». «Et», nous est-il dit, «ils fortifièrent leurs mains pour bien faire». Ainsi, tout avait été préparé de Dieu: l’instrument, et des cœurs pour accepter ses encouragements et ses exhortations. Les ennemis, Sanballat, Tobija et Guéshem se moquent de ce résidu insignifiant et le méprisent. Comment pourraient-ils supposer, eux qui ne connaissent pas Dieu, que des êtres craintifs et sans force puissent accomplir une œuvre jugée impossible par l’esprit humain? Mais ils ne se bornent pas à cela et cherchent à intimider ceux qui sont maintenant décidés à se mettre résolument à l’œuvre: «Voulez-vous vous révolter contre le roi?» s’écrient-ils; mais rien n’émeut Néhémie. Il répond: «Le Dieu des cieux, lui, nous fera prospérer, et nous, ses serviteurs, nous nous lèverons et nous bâtirons; mais vous, vous n’avez ni part, ni droit, ni souvenir à Jérusalem». C’est le même principe qui caractérise le peuple, en Esdras 4:3. En effet, qu’il s’agisse de bâtir la maison, ou d’édifier les murailles de la ville, ce principe ne change pas. Le peuple de Dieu ne peut en aucune manière s’associer au monde pour faire l’œuvre de Dieu, sous quelque forme qu’elle se présente. Un des caractères dominants du livre de Néhémie est que la séparation de ce qui n’était pas juif y est soigneusement affirmée et maintenue, en dépit des principes relâchés de quelques-uns. «Vous n’avez ni part, ni droit, ni souvenir à Jérusalem», est confirmé par la conduite subséquente du peuple, et si ses chefs manquent de conscience à cet égard, ils sont repris et rendus honteux devant tous (voyez 9:2; 10:30; 13:1, 3, 28, 30).